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Réticence intentionnelle de l’assuré : éclaircie en vue pour les assureurs

Pour prononcer la nullité du contrat d’assurance en cas de réticence intentionnelle d’une société assurée, les juges du fond n’ont pas à rechercher si son représentant légal avait eu l’intention de causer un dommage à l’assureur. En cas d’annulation, il résulte de l’article 1165 du code civil que seul l’assuré auquel ont été versées les indemnités est tenu de les restituer.

par Julien Delayen, Membre du CEPRISCAle 5 juillet 2022

Obtenir la nullité pour réticence ou fausse déclaration intentionnelle de l’assuré sur le fondement de l’article L. 113-8 du code des assurances n’est jamais chose facile. Celle-ci n’intervient qu’au terme d’un long processus probatoire pesant entièrement sur l’assureur. Ce dernier doit en effet démontrer, d’abord, l’existence de questions suffisamment précises posées à l’assuré, puis, que les réponses apportées personnellement par ce dernier s’avéraient inexactes, ensuite, que cette fausse déclaration initiale ou la réticence quant à une modification postérieure a été réalisée de manière intentionnelle, et, pour finir, que ces dernières ont eu un impact sur l’opinion de l’assureur (v. égal., A. Pélissier, obs. ss Civ. 2e, 17 nov. 2016, n° 15-24.819, RGDA 2017. 37). Ajoutons à cela que l’essentiel de ces conditions sont soumises à l’appréciation souveraine des juges du fond et on comprendra qu’il y a de quoi décourager l’action des plus téméraires. C’est ainsi qu’un auteur a pu récemment expliquer le constat d’une diminution sensible du contentieux en la matière par la « lassitude des assureurs qui ne voient peut-être plus trop l’intérêt de se heurter à un rejet » (D. Krajeski, obs. ss Civ. 2e, 9 déc. 2021, n° 19-22.366, RCA 2022. Comm. 88). Une lueur d’espoir pourrait toutefois provenir d’un arrêt rendu le 16 juin dernier d’autant plus intéressant qu’il est destiné à une publication au bulletin (Civ. 2e, 16 juin 2022, n° 20-20.745, D. 2022. 1204 ).

Dans cette affaire, ayant déjà fait l’objet d’une première censure de la Cour de cassation (Civ. 2e, 7 févr. 2019, no 18-10.658 NP, RCA 2019. 147, obs. H. Groutel), une SCI, afin de se prémunir contre les risques d’impayés de loyers d’un bail conclu le 1er septembre 2010 avec Mmes M. et B., avait conclu auprès de deux assureurs un contrat d’assurance régi par l’ancien dispositif « garantie des risques locatifs » (remplacé par le dispositif Visale depuis le 1er janv. 2016). Toutefois, en parallèle, le gérant de la SCI avait également conclu le 15 septembre 2010, à titre personnel nous dit l’arrêt, un autre contrat de bail sur le même bien mais, cette fois, avec Mme M et son fiancé, M. O.

Plus tard, la SCI assurée, prétendant que les locataires initiaux n’avaient pas honoré leurs loyers entre le 1er septembre 2011 et le 31 décembre 2013, sollicita la garantie de ses assureurs à hauteur du montant des loyers impayés. Comme l’avait remarqué...

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