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Rappels concernant la mise en examen et la motivation de la peine de confiscation

La décision ici commentée invite à quelques rappels procéduraux, d’abord à propos de la détermination par la chambre de l’instruction des indices graves ou concordants faisant suite à une ordonnance de non-lieu, puis concernant la motivation attendue par le juge qui prononce une peine de confiscation.

par Margaux Dominatile 21 juin 2021

En l’espèce, un individu est mis en examen à l’issue d’une information ouverte contre lui du chef d’extorsion et vol le 11 juillet 2008. Le 11 mars 2009, la mise en examen est annulée par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bastia, qui considère que cette nullité entraîne le placement de l’intéressé sous le statut de témoin assisté. Le 3 mai 2011, le juge d’instruction du tribunal de grande instance d’Ajaccio rend une ordonnance de non-lieu, confirmée le 23 novembre 2011 par la cour d’appel de Bastia, saisie sur l’appel des parties civiles, qui forment ensuite un pourvoi contre cette décision. Le 11 juin 2013, la chambre criminelle casse en toutes ses dispositions l’arrêt rendu par la juridiction de second degré et renvoie les parties devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris. Celle-ci, dans un arrêt du 3 mars 2014, a infirmé l’ordonnance de non-lieu rendue par le juge d’instruction le 3 mai 2011, et renvoyé le prévenu devant le tribunal correctionnel des chefs de violation de domicile, dégradation du bien d’autrui et vols, qui l’en a déclaré coupable, l’a condamné à trois mois d’emprisonnement avec sursis, 20 000 € d’amende. Celui-ci forme un pourvoi contre cette décision.

La mise en examen

Le premier pourvoi formé devant la Cour de cassation reprochait à la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris d’avoir porté atteinte à l’autorité de la chose jugée, telle qu’elle est prévue par les articles 6, 113-8 et 591 du code de procédure pénale (§ 12). L’intéressé soutenait en effet que la juridiction de second degré s’était appuyée sur les actes de procédure antérieurs à l’ordonnance de non-lieu prononcée par le juge d’instruction, pour caractériser l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable sa participation aux faits qui lui sont reprochés. En somme, il estimait que l’annulation de sa mise en examen était une décision revêtant « l’autorité de chose jugée qui s’oppose à ce qu’une nouvelle appréciation des mêmes indices puisse conduire à une décision contraire de la part du juge d’instruction en l’absence d’éléments nouveaux apparus à la procédure postérieurement » (§ 12 du présent arrêt).

Il n’est plus l’heure de le rappeler, la mise en examen d’un individu suppose l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable sa participation aux faits qui lui sont reprochés (C. pr. pén., art. 80-1). Si ce « palier » semble assez flou pour que l’on s’interroge légitimement sur les éléments propres à caractériser ce faisceau d’indices, il en reste que la jurisprudence admet, de manière constante, qu’il s’agit là du seuil minimal exclusif pour la mise en examen d’un individu suspect (v. C. Guéry, « Les paliers de la vraisemblance pendant l’instruction préparatoire », JCP 1998. I. 140 ; Crim. 14 mai 2002, n° 02-80.721, Bull. crim. n° 111 ; JCP 2002. 2172 ; 29 mars 2006, n° 06-80.273, Bull. crim. n° 99 ; D. 2006. 1332 ; Gaz-Pal. 25-26 oct., p. 8 ; 13 sept. 2011, n° 11-82.051, Bull. crim. n° 176 ; Dalloz actualité, 21 oct. 2011, obs. C. Girault ; D. 2011. 2403  ; Dr. pénal 2012. Comm. 1, obs. Georget ; Procédures 2011, n° 380, obs. Chavent-Leclère), et dont le pouvoir d’appréciation souverain revient exclusivement aux juridictions de l’instruction (Crim. 14 avr. 2015, n° 14-85.334, Dalloz actualité, 18 mai 2015, obs. J. Gallois ; D. 2015. 1738, obs. J. Pradel ; AJ pénal 2015. 608, obs. J. Lasserre Capdeville ; RSC 2015. 895, obs. F. Cordier  ; Procédures 2015, n° 239, note Chavent-Leclère ; 28 juin 2016, n° 15-86.946, Dalloz actualité, 19 juill. 2016, obs. D. Goetz).

En l’espèce, dans l’exercice de cette fonction, la chambre de l’instruction s’était fondée sur « l’ensemble des éléments du dossier de l’information, en particulier de ceux qui ont été rassemblés après l’arrêt ayant annulé sa mise en examen, […] ces éléments établissent l’existence de tels indices » (§ 14), et bien qu’aucun élément nouveau ne soit intervenu dans la procédure postérieurement (Crim. 12 juill. 2016, n° 16-82.692, Dalloz actualité, 31 août 2016, obs. A. André ; D. 2016. 1651 ; AJ pénal 2016. 492, obs. J.-B. Thierry  ; Dr. pénal 2016, n° 152, obs. P. Conte ; Gaz. Pal. 2016. 2795, obs. Detraz). Dans un attendu de principe laconique, la chambre criminelle avalise l’argumentaire concis présenté par la chambre de l’instruction, son contrôle s’étant limité, comme il est le cas classiquement, à l’objectivité de l’appréciation de la nécessité de la mise en examen par la chambre de l’instruction (§ 15).

À titre conclusif, l’on ne peut cependant que constater que la...

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